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Ajustements au régime des Prestataires de Services sur Actifs Numériques (PSAN)
En application d’une Ordonnance du 9 décembre 2020, qui sera complétée par deux décrets d’ici fin 2020, les adaptations suivantes au régime des PSAN (prestataire de services sur actifs numériques) ont été réalisées, certaines d’entre elles suspendues à la sortie des décrets susmentionnés
Le tableau suivant résume les mesures :
Avant | Après | |
---|---|---|
Activités pour lesquelles l’enregistrement est obligatoire | Conservation d’actifs numériques, achat ou vente d’actifs numériques contre monnaie fiduciaire. | Idem + exploitation d’une plate-forme de négociation d’actifs numériques et prestation d’achat ou vente d’actifs numériques contre d’autres actifs numériques(délai d’enregistrement de 6 mois) |
Procédure d’enregistrement | Contrôle a priori du dossier par les régulateurs français (AMF et ACPR), sur l’honorabilité et les procédures LCB-FT. | Contrôle a priori allégé, pour les conservateurs et prestataires d’achat ou vente d’actifs numériques contre monnaie fiduciaire Pas de procédure de contrôle a priori pour les plateformes de négociation et les prestataires d’achat ou vente d’actifs numériques contre d’autres actifs numériques. |
Territorialité | Tous les acteurs qui fournissent leurs services à des clients résidant ou établis en France. L’applicabilité de ces règles posait question (textes de loi). | Tous les acteurs qui fournissent leurs services à des clients résidant ou établis en France. |
Règles AML-CFT / KYC – applicables à tous les prestataires dans le cadre de l’enregistrement obligatoire | Pas de KYC obligatoire pour les clients occasionnels si < 1000 € de volume KYC complet pour les transactions réalisés dans le cadre d’une relation d’affaires. | KYC complet pour tout type de transactions (crypto-fiat et crypto-crypto), tous montants (à partir du 1er euro), tous types de clients (relations d’affaire et occasionnels) |
Modifications de la procédure d’enregistrement obligatoire
La réglementation française comporte 2 volets : un enregistrement obligatoire et un agrément facultatif (voir détails dans notre note). L’enregistrement obligatoire implique des vérifications sur l’honorabilité et les procédures LBC-FT établies. La procédure d’enregistrement n’était obligatoire que pour les conservateurs et les prestations d’achat et de vente entre monnaie fiduciaire et actifs numériques. Elle impliquait une procédure de contrôle a priori complète (et assez longue) auprès des régulateurs français (AMF et ACPR).
L’ordonnance prévoit désormais que les entreprises qui fournissent des prestations d’achat et de vente entre actifs numériques et qui exploitent une plate-forme de négociation d’actifs numériques relèvent du régime d’enregistrement obligatoire.
Le changement s’accompagne de :
- Un délai de grâce de six mois pour l’enregistrement, pour les deux nouvelles catégories d’acteurs (expirant le 10 juin 2021).
- Une modification du périmètre de la procédure de contrôle a priori, comme suit :
- L’inscription aux services 1 (conservation) et 2 (achat et vente d’actifs numériques contre euros) comprend toujours une phase de contrôle a priori auprès des régulateurs français, mais avec un champ réduit pour accélérer le temps de traitement.
- L’inscription aux services 3 (achat et vent d’actifs numériques contre d’autres actifs numériques) et 4 (exploitation d’une plateforme de négociation) ne comprend pas de procédure de contrôle a priori auprès des régulateurs français. L’inscription est donc effective immédiatement. Cela ne veut pas dire que les obligations sont moins strictes. Des audits post-enregistrement par les régulateurs peuvent avoir lieu à tout moment.
Clarification de la territorialité du régime PSAN
L’actuelle doctrine AMF précise que tous les acteurs qui fournissent leurs services à des clients résidant ou établis en France doivent s’inscrire en France ; avec une liste exhaustive de critères (§3.2). L’applicabilité effective de ces lignes directrices était incertaine car la loi ne prévoiyait pas de règles claires de territorialité.
L’ordonnance clarifie les règles de territorialité conformément à la doctrine AMF. Toutes les sociétés qui fournissent leurs services à des clients résidant ou établis en France entrent dans le champ d’application de la réglementation impérative, telle que définie par l’AMF :
« Le service est fourni à des clients résidant ou établis en France lorsque l’un des critères suivants est rempli :
- le prestataire dispose d’un local commercial ou d’un lieu destiné à la commercialisation d’un service sur actifs numériques en France ;
- le prestataire a installé un ou des automates offrant des services sur actifs numériques en France ;
- le prestataire adresse une communication à caractère promotionnel, quel qu’en soit le support, à des clients résidant ou établis en France. A titre d’exemple, est visée la communication via la presse, la radio, la télévision, les affiches, un bandeau d’affichage, une bannière, un site internet, les réseaux sociaux, les applications mobiles, des road show, la participation à des salons, toute invitation à un évènement , des campagnes d’affiliation, du reciblage publicitaire (retargetting), l’utilisation d’un formulaire de réponse ou l’invitation à télécharger une application ou à suivre une formation, etc. ;
- le prestataire organise la distribution de ses produits et services via un ou des réseaux de distribution à destination de clients résidant ou établis en France ;
- le prestataire dispose d’une adresse postale ou de coordonnées téléphoniques en France ;
- le prestataire dispose d’un nom de domaine en .fr.
La rédaction d’une ou plusieurs pages du site et/ou toute communication liée(s) à un service sur actifs numériques en français doit conduire à vérifier si l’un ou l’autre des critères ci-dessus est rempli pour établir si ledit service sur actifs numériques est fourni en France.
La liste des critères ci-dessus permettant de déterminer si le service sur actifs numériques est fourni en France n’est pas exhaustive. »
Durcissement des règles LBC-FT / KYC
L’ordonnance sera complétée par deux décrets à paraître d’ici fin 2020 visant à renforcer les dispositifs de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LBC-FT) applicable aux PSAN. Le gouvernement français a justifié un tel renforcement par le contexte des attaques terroristes qui ont eu lieu récemment en France et de l’actualité récente selon laquelle de l’argent a été envoyé en Syrie à l’aide de Bitcoin.
Par les décrets à venir, le gouvernement réduira le niveau minimum avant application des procédures obligatoires de LBC-FT à 0 EUR. Ce changement rend en pratique inopérant le régime des transactions « occasionnelles » précédemment autorisé. Ce régime prévoyait qu’aucun KYC n’était obligatoire pour les transactions jusqu’à 1 000 EUR lorsque le client était « occasionnel ».
En pratique, toute entité devant être enregistrée en France (selon les critères ci-dessus) sera donc tenue d’appliquer pleinement les dispositions françaises LBC-FT, notamment en matière d’identification des clients quels que soient les montants déposés / échangés par le client.
Les procédures autorisées pour la réalisation de l’identification de client à distance sont limitées et définies par le Code Monétaire et Financier. Elle doit être réalisée :
- à l’aide d’un processus d’identification certifié par l’ANSSI ; ou
- en effectuant 2 des 6 procédures définies par l’ article R. 561-5-2 du code.
Nouveaux prestataires KYC prévus
Le Gouvernement a été informé par l’Adan que ces moyens pour mener à distance des procédures d’identification complètes n’étaient pas adaptées aux acteurs crypto-natifs, car la liste limitative des procédures n’est pas facile à respecter dans ce cas, et plus spécifiquement pour les transactions crypto-crypto ou les conservateurs. Il n’y a actuellement aucun acteur certifié capable de mettre en œuvre toutes les obligations pour des clients localisés hors de France.
En réponse, nous avons été informés par le ministère de l’Économie et des Finances que l’autorité de certification française (ANSSI) devrait rapidement terminer la certification des nouveaux services KYC.
Il convient également de noter que des prestataires d’identification français et des membres de l’Adan, informés de ces difficultés, construisent de nouvelles solutions qui seraient à la fois adaptées aux activités de prestation d’achat et de vente entre crypto-actifs et de conservation et conformes à deux des six procédures limitatives définies par le Code Monétaire et Financier.
De plus amples informations sur ces initiatives seront relayées par l’Adan lorsqu’elles seront disponibles.